Lanceurs d'alerte

Le 25 octobre dernier, un projet de loi a été voté à la Chambre des Représentants en vue de la transposition de la directive 2019/1937 du 23 octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union.

Cette directive a pour objectif de fixer des normes minimales en vue d’une meilleure protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union européenne (« lanceurs d’alerte »).

La loi belge vient donc transposer en droit belge les obligations imposées par la Directive en ce qui concerne les entreprises du secteur privé.

La nouvelle réglementation qui impose aux entreprises comptant plus de 50 travailleurs de mettre en place une procédure, un canal de signalement ainsi qu’un suivi qui permettent aux travailleurs de signaler certaines violations entre en vigueur le 15 février 2023. Les travailleurs qui signalent ces violations bénéficient d’un régime de protection

Contenu

La présente loi établit des normes minimales communes pour la protection des personnes signalant les violations suivantes:

1) les violations qui concernent les domaines suivants:

- marchés publics;

- services, produits et marchés financiers et prévention du blanchiment de capitaux et du

financement du terrorisme;

- sécurité et conformité des produits;

- sécurité des transports;

- protection de l'environnement;

- radioprotection et sûreté nucléaire;

- sécurité des aliments destinés à l'alimentation humaine et animale, santé et bien-être des

animaux;

- santé publique;

- protection des consommateurs;

- protection de la vie privée et des données à caractère personnel, et sécurité des réseaux et des

systèmes d'information;

- lutte contre la fraude fiscale;

- lutte contre la fraude sociale.

Toute violation des dispositions légales ou réglementaires ou des dispositions européennes

directement applicables, ainsi que toute violation des dispositions adoptées en exécution

des dispositions précitées, entrent dans le champ d'application de la présente loi;

2) les violations portant atteinte aux intérêts financiers de l'Union et, le cas échéant, dans les dispositions

nationales d'implémentation;

3) les violations relatives au marché intérieur y compris les violations des règles de l'Union en matière de

concurrence et d'aides d'Etat.

Pour qui ?

Les entreprises visées par la mise en place obligatoire d’un canal de signalement sont les entreprises relevant du secteur privé qui occupent au moins 50 travailleurs. Par ‘entreprise’, la loi vise l’entité juridique.

Toutefois, ce seuil ne s’applique pas aux :

- entreprises actives dans le domaine financier ;

- entreprises actives dans le domaine de la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme.

Celles-ci sont obligées de créer un canal de signalement interne, peu importe le nombre de travailleurs qu’elles occupent.

Pour les entreprises comptant plus de 250 travailleurs, une obligation supplémentaire s’applique: ces entités devront rendre possible des signalements anonymes. Enfin, le délai pour la mise en place d’un canal de signalement dépend à son tour du nombre de travailleurs dans l’entreprise.

À quel moment faut-il remplir cette obligation ?

Mise en œuvre des nouvelles dispositions légales au sein des entreprises de plus de 250 travailleurs et dans les entreprises du secteur financier relevant des dispositions relatives aux services, produits et marchés financiers et/ou au blanchiment de capitaux et au financement du terrorisme : au plus tard le 15 février 2023.

Mise en place des canaux de signalement interne pour les entreprises du secteur privé comptant entre 50 et 249 travailleurs :au plus tard le 17 décembre 2023.

Comment mettre en pratique ?

Une consultation des partenaires sociaux est requise préalablement à la mise en œuvre du canal de signalement. Il s’agit, selon le cas, du conseil d’entreprise, du comité pour la prévention et la protection au travail (CPPT) ou, à défaut, de la délégation syndicale.

Ensuite, l’entreprise a deux options afin de mettre en œuvre un canal de signalement. Elle peut le faire en interne, en désignant un gestionnaire de signalement impartial, soit en confiant la mise en place et la gestion du canal à un tiers. Enfin, l’entreprise peut elle-même décider si elle souhaite permettre à d’autres lanceurs d’alerte que les travailleurs d’avoir accès au canal interne afin d’effectuer des signalements : il peut s’agir de travailleurs indépendants, de sous-traitants ou d’anciens travailleurs. entreprises actives dans le domaine de la prévention du blanchiment de capitaux et du financement

Les procédures de signalement interne et de suivi comprennent les éléments suivants :

1) Un ou plusieurs canaux pour la réception de signalement. Par le biais du canal de notification interne, il doit être possible de signaler les violations par écrit ou oralement. À la demande du lanceur d’alerte, il doit également être possible de signaler une violation par le biais d'une rencontre en personne. Dans les entités juridiques comptant 250 employés ou plus, les signalements doivent également pouvoir être effectués de manière anonyme ;

2) protéger de manière sécurisée la confidentialité de l’identité du lanceur d’alerte (et d’autres tiers cités à l’occasion du signalement);

3) traiter les données à caractère personnel conformément à la réglementation y afférente ;

4) un accusé de réception du signalement doit être adressé à l’auteur de signalement dans un délai de sept jours à compter de la réception de son signalement ;

5) un délai raisonnable pour fournir un retour d’informations (max 3 mois) ;

6) la mise à disposition d’informations claires et facilement accessibles concernant les procédures de signalement externe ;

7) la désignation d’un gestionnaire de signalement ;

8) un suivi diligent par le gestionnaire de signalement, en ce compris pour les signalements anonymes ;

9) tenir un registre qui reprend tous les signalements effectués. Ces signalements seront conservés jusqu’à la fin de la relation contractuelle.

La loi ne stipule pas sous quelle forme ces règles doivent être mises en œuvre. Cela peut donc se faire,

au choix via le règlement de travail, une convention collective de travail ou une policy.

La loi interdit tout type de représailles ou de traitement défavorable vis-à-vis du lanceur d’alerte, les menaces et tentatives de représailles sont également couvertes par la protection. En outre, si le lanceur d’alerte recourt à l’anonymat pour effectuer un signalement, il sera également protégé si son identité est révélée ultérieurement et qu’il est victime de représailles.

bruno velghe